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Église Saint-Michel de Murato - San Michele di Muratu (Haute-Corse)
Une des plus célèbres Eglises de Corse
Construite au XIIe siècle, l'Eglise de Saint-Michel à Murato - San Michele di Muratu - est l'un des monuments religieux les plus emblématiques de la Corse. Célèbre bien au-delà de la Méditerranée, et mentionnée dans les récits de Prosper Mérimée, elle attire chaque année plus d'une centaine de milliers de visiteurs.
L'édifice est d'architecture romane avec un style pisan comme le rappelle ses façades bicolores de pierres vertes et blanches rectangulaires. Les premières constituées de serpentine (chloritite) locale issue du fleuve du Bevinco qui traverse le village, et les pierres blanches formées de calcaire provenant de Saint-Florent.
En 1839, Prosper Mérimée alors en voyage d'inspection en Corse dira la considérer comme « la plus élégante et la plus jolie qu'il ait vu en Corse ». Elle sera classée Monument Historique en 1840, soit un an plus tard.
Fête de la Saint-Michel le 8 mai à Murato - Procession
Le 8 mai est la fête patronale du village de Murato, au cours de laquelle est célébrée l'apparition de l'Archange Saint-Michel sur le Mont Gargan, survenue en 492.
Jour férié également en raison de la commémoration de l'Armistice du 8 mai 1945, cette date réunit chaque année les Muratais et de nombreux habitants des villages environnants. La journée débute par un moment de recueillement au monument aux morts, sur la place de l'église paroissiale de l'Annonciation, avant l'entame de la procession à pied jusqu'à l'église Saint-Michel. Une messe solennelle y est célébrée, souvent présidée par l'évêque de Corse - Mgr de Germay en 2015 - ou par le Cardinal Bustillo en 2024.
Cette tradition très vivante se poursuit tout au long de la journée, avec une ambiance à la fois religieuse et conviviale : buvette, stands de restauration et jeux pour les enfants rythment cette journée festive. L'événement marque aussi le renouveau du printemps et l'arrivée des beaux jours, dans un esprit de partage et de ferveur populaire.
À noter que la fête liturgique officielle de Saint-Michel est célébrée le 29 septembre.
Visiter l'église Saint-Michel de Murato (San Michele di Muratu)
Classée Monument Historique, l'église Saint-Michel de Murato se visite de mai à novembre. Située sur les hauteurs du village, elle offre un panorama exceptionnel sur la plaine du Nebbio et le golfe de Saint-Florent. Vous pouvez la découvrir librement ou accompagné d'un audioguide pour en percer tous les secrets.
Tarifs des visites
| Type de visite | Tarif | Conditions |
|---|---|---|
| Visite libre | 2 € | Par adulte |
| Visite libre (groupe) | 1,50 € | À partir de 12 personnes |
| Enfants | Gratuit | Moins de 12 ans |
| Visite + audioguide | 5 € | Tarif individuel |
| Audioguide seul | 3 € | Location sur place |
La visite libre permet d'admirer à son rythme les pierres vertes et blanches de style pisan, tandis que l'audioguide offre une immersion dans l'histoire fascinante de San Michele di Muratu : sa construction médiévale, ses symboles sculptés et sa place dans le patrimoine religieux corse.
Le contexte du XI et XII siècle
La Corse sort de plusieurs siècles d'offensives sarrasines qui forcent les populations à quitter le littoral pour les régions montagneuses. Aidée par Charlemagne à plusieurs reprises puis par une alliance Génoise et Pisane. Le Pape Grégoire VII sera à l'origine du système de Piève et demande à l'évêque de Pise d'instaurer des institutions administratives, religieuses et judiciaires, entreprenant la construction d'édifices, Eglises, ponts, zones portuaires et de donner plus de moyens aux populations locales pour se défendre. Saint-Michel fera partie de la Piévanie du Bevinco, et du diocèse du Nebbiu. La Corse connait alors 2 siècles de prospérité, la "Pax Pisana".
Construite au XIIe siècle
Ordonnée par les seigneurs de Petr'a l'Arreta, sa fondation est estimée entre 1130 et 1140 et semble s'être réalisée en deux temps selon les écrits, d'abord avec la Nef, puis le clocher porche. La légende voudrait qu'elle fut bâtie en une nuit par des Anges. C'est une des Eglises les plus anciennes de l'île, son état de conservation vient également des travaux de rénovations effectués à plusieurs reprises, avec notamment le rehaussement du clocher en 1855 par Achille Murati, dont le grand-père était un chef d'armée de Pascal Paoli.
Saint-Michel se distingue par son ancienneté, sa typicité, mais aussi son emplacement particulier, au centre d'une grande parcelle emmurée, avec vue sur le golfe de Saint Florent et faisant face à son village de Murato.
Structure de l'édifice
La structure extérieure de Saint-Michel est composée d'une Nef, un choeur qui se termine par une abside en forme d'hémicycle, semi-circulaire. Le clocher reposant sur 2 colonnes cylindriques. Le toit est en lauzes vertes, toiture typiquement insulaire, et la charpente en bois apparente.
Sur l'abside semi-circulaire donc façade est, une lucarne en forme de Croix reçoit la lumière du soleil levant - photo.
Les façades polychromes de style pisan sont composées de cinq fenêtres-meurtrières dont une sur le mur de l'hémicycle, et de modillons sur le pourtour de l'édifice. A noter que la polychromie des murs est très similaire à la chapelle de la Sainte Trinité d'Aregno datant de la même époque.
L'intérieur est orné de fresques murales pour certaines effacées par le temps. Un oculus se tient sur la façade d'entrée à l'ouest.
Linteau de Saint-Michel
Touché par la foudre en 1969, le linteau de Saint-Michel a été reconstitué depuis. Il représente deux oiseaux, deux paons aux plumes constellées de pierres, tirant chacun l'oreille d'un homme placé au centre, les tenant par une patte.
Sculptures des archivoltes et interprétation
Les archivoltes des fenêtre-meurtrières - sculptées dans la serpentine et le calcaire - semblent représenter des scènes bibliques parfois mêlées à un héritage païen. Dans le contexte de l'époque du XIIe siècle, les tailleurs de pierre transmettaient encore des motifs très anciens - hérités du monde gréco-romain ou même celto-méditerranéen - mais qu'ils réinterprétaient sous le regard du christianisme.
Noé et la vigne après le déluge
Dans la Bible après le Déluge (Genèse 9:20-21), Noé planta de la vigne, en but le vin et s'enivra. Il est considéré dans la tradition chrétienne comme le premier vigneron de l'Humanité.
Sur cette sculpture, la vigne est clairement le motif central du relief symbolisant la renaissance de la vie et la filiation de l'homme avec la terre après la destruction des eaux. Noé est sur la droite avec une serpette pour récolter les grappes de raisin, et on observe à gauche l'Ange qui bénit la vigne.
Symbolisme des serpents entrelacés de l'archivolte
Sur cette archivolte, deux serpents entrelacés pouvant faire penser au Caducée de Mercure (ou d'Hermès), symbole antique d'équilibre cosmique, de guérison et de médiation entre les forces opposées. Dans la lecture médiévale, ces serpents ne sont plus païens : ils deviennent les signes du dualisme chrétien entre le bien et le mal, la vie et la mort.
Les oiseaux, eux, sont souvent le symbole du ciel et de l'esprit. Aux extrémités, deux étoiles à six branches rappellent le cosmos et la perfection de la création.
Agneau victorieux dans l'Apocalypse
Cette frise représenterait l'Agneau victorieux de l'Apocalypse, symbole du Christ triomphant du Mal. Entre deux bêtes féroces, l'Agneau demeure debout et paisible, image du sacrifice rédempteur et de la victoire spirituelle.
Scène de la tentation
Cette représentation évoque clairement la scène biblique du jardin d'Eden, lorsqu'Eve est tentée par le serpent de prendre le fruit défendu.
Symbolisant aussi l'humanité face au serpent enroulé autour de l'arbre de la connaissance. Le personnage nu, la main levée, hésite entre obéir à Dieu ou céder à la ruse du Mal.
Frise aux 12 cercles entrelacés
Cette frise, très géométrique et répétitive, semble au premier abord purement ornementale… mais elle ne l'est pas. Elle appartient à ce langage symbolique universel qu'utilisaient les maîtres sculpteurs du XIIe siècle, où chaque forme traduit une idée spirituelle, cosmique ou théologique.
Modillons
Saint-Michel est composé d'un très grand nombre de modillons sur tout le pourtour de l'Eglise. Ces modillons se veulent simples et éloquents sans superficialité pour être accessibles au plus grand nombre certainement. Ils évoquent entre autres, la justice, la loi, et les valeurs religieuses, par des représentations d'objets, personnages et animaux. On retrouve sur la devanture deux personnages avec semblerait-il une représentation de la loi, l'un muni d'un rouleau, l'autre vêtu d'une robe tout comme on trouvera un parchemin sur la façade sud, qui elle se compose entre autres, de deux oiseaux dos à dos, un portrait de femme, des étoiles à différents sommets, un forme semblant rappeler l'infini ou l'univers, un triton qui symboliserait le pêché de la luxure.
Le tombeau
En contrebas de Saint-Michel se trouve un tombeau où sont inscrits les noms d'Achilles Murati et Romanus Murati, personnages historiques du village. Achille Murati fut le lieutenant de Pascal Paoli.
Emission sur Saint-Michel en corse par le CRDP
Quelques sources intéressantes
Ci-après, quelques liens intéressants et pertinents pour approfondir avec l'association Imagina Muratu qui apporte des éléments supplémentaires tout comme le blog d'Elisabeth Pardon au sujet des sculptures, modillons et motifs de l'Eglise de Saint-Michel.
